Il était une tortue indifférente et fière
Qu’un homme de qualité admirait sans retenue.
La demoiselle c’est vrai n’était pas ordinaire
Insouciante à l’attrait que suscitait sa vue.
La nature l’avait nimbée d’un fou mystère
Car personne à ce jour n’avait pu la voir nue.
L’épaisse carapace qui recouvrait sa chair
La rendait équivoque comme un malentendu.
Venue du fond des âges, elle avançait altière
Ignorante du temps qu’elle vivait suspendu.
L’homme s’attendrissait à la regarder faire
Le tour du jardinet, pour elle vaste étendue.
Et quand pour surmonter les rigueurs de l’hiver
Elle s’y enterrait, qu’on ne la voyait plus
Il attendait anxieux qu’elle ressorte de terre
S’effrayant au printemps qu’elle n’est pas reparu.
Mais un beau jour enfin entre deux primevères
La belle resurgissait nouvelle et inconnue
Inchangée, juste un peu plus méfiante qu’hier
S’apprivoisant à l’homme dont la tendresse accrue
L’embarrassait plutôt que de la satisfaire
Une feuille de salade l’eut davantage émue.
Heureusement la nature est une bonne mère
La flore environnante lui offrait son salut.
Parfois entre ses mains l’homme la hissait en l’air
Ne sachant pas combien une frayeur indue
Paniquait l’animal, danger imaginaire
Pour nos esprits humains, mais néanmoins vécu
Par la petite bête comme un tour en enfer,
Le comprenant, l’homme la reposait confus.
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