L'autre rivage

La plage est déjà belle au soleil du matin

Le sable est encore tiède, il s’approprie mes pieds

J’avance vers la mer éblouie de beauté.

Le ciel à l’horizon l’embrasse de rayons

Ces deux chaque jour s’enlacent avec amour,

C’est alors mille brillances qui dansent sur les ondes

En petites facettes transparentes et dorées

Sublimes, dans un regard on voudrait les figer

Il est déjà trop tard, l’écume les a volées.

 

Le sable ralentit ma marche trop pressée

La nuit est une enveloppe, en son obscurité

Seul un quartier de lune miroite sur l’eau salée

Le ciel sans étoiles plonge au loin dans la mer

Ces deux-là chaque soir s’étreignent dans le noir.

J’entends des clapotis, on approche de l’eau

Je dois presque courir, me laisser emporter

Lorsque mon pied se mouille à la première vague

Je suis un peu surpris, elle me semble si froide.

 

Je pénètre doucement dans cette immensité

Promesse de vacances, cette mer sans marée

Offre sa nonchalance à mes premières brassées.

Bientôt ils seront là, arrivés par dizaines 

Leur serviette fétiche négligemment jetée

Pas trop près du ressac, il pourrait la mouiller.

Je rentre toute entière encouragée par l’eau

Elle me porte comme une mère, je lui confie mon dos

Sur cette plage aujourd’hui on est au paradis.

 

Il me faudrait nager, je n’ai jamais appris

Mais enfin j’y suis presque, j’aperçois le bateau

On me hisse, on m’extrait de ce bain de minuit

Nous sommes des dizaines à nous agglutiner

Alourdis par l’espoir de cette traversée

Demain nous serons loin de cette plage de misère

Et loin de ce pays de violence et de guerre

Mais pour l’heure chaque vague menace notre folie

Sur ce rafiot cette nuit on traverse l’enfer.

 

Mon corps goûte impudique à la double caresse

De l’eau et du soleil s’amusant tour à tour

Lui prompt à la brûlure, elle à me rafraîchir.

Bientôt je vais sortir, du sel sur la peau

Je laisserai la brise se perdre dans mes cheveux

Et m’offrirai au ciel pour me brunir un peu

Alanguie sur la dune, le temps au ralenti,

La journée sera belle devant ce rêve bleu

Infinie sous mes yeux, cette mer est un mystère.

 

J’essaie de me tenir, je me fais tout petit

Mais le bateau chavire, nous étions trop nombreux

A tenter l’aventure, voguer vers d’autres cieux.

Là-bas nous attendaient le bonheur et l’aisance

Nous a dit le passeur en prenant notre argent

Nous aurions tout donner pour un peu d’espérance.

Bientôt je vais mourir c’est la fin du voyage

Je ne verrai jamais au loin l’autre rivage

Nous coulons vers le fond, cette mer est un cimetière.


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