Une femme est entrée. Et l'humanité a souri. Une femme a vécu et la barbarie a reculé. Certains êtres ont dans les yeux suffisamment de grâce et dans l'esprit suffisamment de détermination pour offrir au monde des hommes une dignité qui lui fait si cruellement défaut la plupart du temps.
Une femme donc est entrée. Au Panthéon. Les lourdes portes de la république se sont ouvertes doucement pour lui signifier combien elle avait sa place parmi les illustres et les héros de ce pays. En ayant fait de sa vie un combat pour la justice et la liberté, en élevant au rang de destin son existence de jeune fille humiliée, niée, martyrisée Simone Veil n'a pas triomphé du malheur, certains d'entre eux sont tels qu'il ne se trouve de mots pour les qualifier, ni de sanglots pour les surmonter. Elle l'a transcendé. Sans esprit de revanche. On ne se venge pas de la vie. On la vit ou on la subit. La vivre au service de l'excellence est la meilleure réponse à apporter aux abîmes de souffrances qu'elle réserve quelquefois.
Aucun acte aussi extraordinaire soit-il ne porte en lui la valeur d'un individu. Définir un être au travers du prisme d'une circonstance particulière de sa vie est le réduire à une identité partielle. Ne réduisons pas Simone Veil à la déportation ou à l'IVG ce serait faire offense à la fille, à la femme, à la magistrate, à la mère, à l'académicienne et à sans doute bien d'autres particularismes moins connus de sa vie. Le degré d'exigence qui fut le sien dans tous ses engagements publics ainsi que les témoignages émus de ceux qui ont côtoyé le personnage privé nous invite à la confiance en cet instinct d'un peuple à reconnaître parmi les siens tel ou telle qui mérite hommage et reconnaissance.
Pour ma part en temps que femme c'est avec toute la gratitude de mon ventre libéré de sa condition que j'adhère pleinement à ce choix qui a été fait d'offrir au repos de Simone Veil le paradis républicain mais mon esprit ne néglige aucune des autres sources d'admiration et de reconnaissance qu'elle suscite.
Elle est entrée au Panthéon accompagnée de l'amour et de l'intelligence d'un homme. Là encore je suis heureuse que la nation ait eu la maturité et la délicatesse de percevoir ce que cet homme, son mari, a pu par sa présence à ses côtés avoir sa part de mérite dans le parcours exceptionnel de son épouse.
C'est donc à un couple qu' aujourd'hui j'adresse ma plus profonde considération et mon émotion sincère face à leurs existences exemplaires. Reposez en paix Madame et Monsieur. Notre société vous remercie.
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