Te voilà revenue, ma sœur, mon ingénue.
Depuis déjà des lunes tu traînais dans ma rue
Je te voyais de loin me sourire l’air de rien,
Tu t’es montrée patiente à m’attendre confiante.
Depuis toutes ces années, je ne t’ai pas oubliée,
Tu as si peu changé, la même trouble beauté
De ta folle violence et de ta cruauté.
Viens puisque tu es là à ralentir mon pas
A vouloir de nouveau le feu de nos combats
Tu ne m’aimes qu’ à terre, la bouche pleine de poussière
Tu ne veux que la guerre, les cercles de l’enfer.
Au fond j’ai toujours su qu’on se retrouverait
Nous sommes de ces ennemis adossés l’un à l’autre
Marcheurs du même chemin, dormant à la même grotte.
Ton absence ne fut vraie que le temps d’un détour
Caressée de baisers et frôlée par l’amour
J’ai cru t’avoir semée dans la brume d’un dimanche
A la douceur de plume d’une main sur ma hanche.
Tu n’étais que tapie dans l’ombre de l’hiver
Dans l’anthracite répit de mes sombres colères,
Tu reprenais des forces, tu gonflais de misère
Pour à nos retrouvailles m’en bourrer les entrailles.
Dès ma première larme tu as crié victoire
As affuté tes armes, couru sur mon trottoir
Déjà sur mes sourires tu posais quelques doutes
Le temps m’était compté tu refermais ton piège,
Je reviendrai bientôt tourner à ton manège.
La musique de ta danse m’a rendue au silence
De nouveau plus de mots, juste des soubresauts
De mutisme obstiné, pointillés de sanglots.
Toute envie envolée aux brises de ton désir
Assoiffé de ma peine et vengeur sur mes rires.
Le froid est revenu me voler au soleil
Martyrisant mes nuits délestées de sommeil.
J’ai fermé mes fenêtres au monde, à son écho
Et clôturé ma porte à la joie, à la prose,
Les vers sont plus enclins aux rimes du chagrin.
J’aurais du, c’est trop tard, m’enfuir de ton cauchemar
J’aurais du te chasser, brûler ton étendard
J’aurais du renoncer à vivre sans regret
C’eut été moins fatal que ton souffle infernal.
Mais qu’importe aujourd’hui puisque tu es ici
A peindre mes humeurs de toutes mes douleurs
Assieds toi je t’en prie, prends place dans mon lit
Tu es là pour longtemps, je prendrai le divan.
Au fond je t’attendais, n’allons pas nous mentir
On se connaît par coeur, tu n’es que moi en pire
Tu ne me fais plus peur, tu peux bien revenir
Je sais que le temps coule, je me roulerai en boule,
Attendre que tu te lasses, que tu me fasses la grâce
D’aller chercher ailleurs un désespoir meilleur.
Tu es mon hirondelle, de tes retours fidèles
J’ai balisé ma vie, trompé mon appétit
Des matins de satin, à l’abri des persiennes
De leur sucrée saveur tendrement magicienne.
Maintenant tu es là, alanguie sur mes jours
Tu as repris ta place au rang de mes intimes
Allez viens mon enfant, ma folie, ma déprime...
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