La terrasse du monde

De la terrasse du monde je regarde la vie,

Ses heures et ses secondes, ses ailleurs, ses ici.

J’invective les passants d’inattendus sourires

Cueillis timidement ou cachetés de cire.

Des bruits et des odeurs enrubannent ma chance

De jouir de cette vue qui m’offre confidence 

Du cliquetis des hommes, leurs murmurants secrets

À l’haleine fétide de piètre vanité.

J’aperçois des merveilles, des harmonies sublimes

Soupirs confidentiels de la nature intime.

Des lacs de dentelle abreuvant les sommets

Et les oiseaux marins planant l’éternité

Sur les larmes de sel d’un océan d’écume

Qui ballotte sa honte de déchets dans la brume.

À l’ombre du lointain je vois des pays flous

Des fumées de violence, des enfants rendus fous

De faim et de terreur qui vivent en urgence

À genoux dans l’enfer de notre indifférence.

Il y a dans d’autres brises, sous d’autres latitudes

Des fleurs de jasmin pleurant la solitude

De femmes encore vivantes habillées de linceuls

Écrasées de soleil, embaumées de tilleul.

Je vois dans un désert à la tristesse d’épave

Voleter des alphabets aux épuisements d’esclaves,

Les mots, ces fils de pute qui baisent dans toutes les langues

S’accouplant pour la rime à devenir exsangues 

De vaine volonté mais beaux à en pleurer

Me laissent inconsolable de cette humanité.

De la terrasse du monde je vois passer l’amour

Dans les yeux enlacés d’amants clairs comme le jour,

J’emboiterai leurs pas, je veux connaître aussi

Le feu de cet émoi, nécessaire folie

Pour accepter de vivre autrement qu’en regret,

Pour refuser de vivre autrement qu’en bûcher...


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