On s'est aimés

On s’est aimés n’est-ce pas?

Dans cette rue nonchalante.

On s’est aimés je crois

D’une fringale urgente,

On s’est aimés pour dire

Que le temps ne vaut rien.

Il se croit bien malin

À abimer les corps,

À mettre au coin des yeux

Des plis et des remords,

À voler aux cheveux

La soie et les fils d’or.

Il se croit invincible

Plus fort que l’eau qui dort

À nous mettre à genoux

À prendre tant et tout

De nos élans sensibles

Tout poisseux d’impossible.

Mais nous on a osé,

Lui dire « Va te faire foutre ».

Il était si surpris

Qu’il s’en est arrêté

Pour une danse, un répit

Nous a donné congé.

Pourtant nous n’avions rien.

Nous étions les mains vides,

À peine quelques chagrins

Surannés et stupides.

Mais au cœur un orage

Nous a rendu avides,

Regonflant de courage

Nos destins malhabiles

À caresser l’amour

Dans le sens du parcours.

Rétifs et indociles,

Aux soirs et aux matins

Qui reviennent chaque jour

Et encore et demain…

Mais voilà pour une fois,

Voilà juste pour un jour

On lui a fait sa fête.

On s’est payé le temps

On s’est collé aux doigts

Le sucre des instants,

Filtrés de mots toujours.

Depuis toutes ces années,

Presque l’éternité

Le temps cet assassin

Nous a laissés pour morts.

Quel prodigieux festin

De lui montrer ses torts…


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