La longue attente

J’ai attendu.
À tous les coins de toutes les rues.
J’ai attendu
Que l’averse s’épuise à faire fuir l’éclaircie.
Que la lune soit ronde pour lui parler tout bas
De la course du monde sur mes peines et mes joies.
J’ai attendu
À l’ombre d’arbres morts de la lâcheté des hommes
J’en caressais l’écorce gravée à l’amour tendre
Par des enfants fiévreux aux yeux gris comme la cendre.
J’ai vu pleurer les soirs au cœur du plein été
Suppliant de sommeil que la nuit tombe enfin.
J’ai attendu
Consolant ma tendresse devenue inutile
De caresses légères maquillées au ricil.
Je me suis évadée
Sous des azurs brûlants et des hivers maussades,
Pour avancer le temps, pour tromper mon ennui
Pour oublier le vide, le silence et le bruit.
Je me suis réchauffée au creux de nombreux lits
De baisers de poussière froids comme des statues
De larmes au goût amer refoulées au-dessus.
J’ai attendu
J’ai refusé la guerre, me suis avouée vaincue
J’ai trouvé le repos, le refuge et l’asile
Dans les bras d’un géant aux humeurs fragiles.
Il a frôlé ma joue d’un amour si docile
Que le passé à genoux est devenu facile.
J’ai attendu
Que les saisons s’étirent envolant mes souvenirs
Je me suis consolée aux ruines d’anciens empires
Les sables étaient mouvants mais soulageaient du pire
Dans le rire des enfants se cachaient mon sourire.
Je l’ai remis en place tout tremblant mais tenace.
Et puis enfin les livres venus à mon secours
Je ne fus plus jamais seule
Dans les pages par milliers, dormait ma liberté.
Il ne me manquait rien,
Il me manquait toujours
Cet autre, ce quelqu’un que l’on aime d’amour.
J’ai attendu
J’ai inventé des mots à faire pâlir le jour
À tarir les sanglots des chagrins du parcours.
J’ai attendu les heures, les minutes, les secondes
En cajolant ma vie jusqu’au secret d’une tombe.
Je t’ai attendu,
Et tu es revenu.


Écrire commentaire

Commentaires: 0