Je me pardonne

Je me pardonne.
Je me pardonne du mal que je n’ai jamais fait
Et même de celui que je n’ai pas su faire.
Je me pardonne mes larmes aux matins de sourires
Et mes rires d’enfant sage à l’heure de dormir.
Je pardonne à ma bouche de n’être que silence
Quand le temps devient clair ou que la lune est blanche.
Je me pardonne aussi mes errances et mes doutes,
D’avoir quitté parfois le tracé de ma route.
Je pardonne à mes mains leur douce incompétence
La caresse et la plume comme unique existence.
Je me pardonne.
Je me pardonne de tout ce qu’on voulait de moi
Que j’ai laissé filer comme sable entre mes doigts.
Je pardonne à ma peur de s’inviter souvent
Sur le gué de ce fleuve qui coule dans mon sang,
Je la regarde en face pour en border mon lit
L’emprisonne de sommeil et de peines non taries.
Je pardonne à ma voix de n’être qu’un murmure
Jusque dans la violence, jusque dans les injures.
Je pardonne à l’enfance les promesses non tenues
Et même au jour qui vient de ne pas payer son dû.
Je me pardonne.
Je me pardonne de tout ce que je ne suis pas
La femme non devenue, celle qui ne sera pas.
Je pardonne à ma vie de n’être qu’un miracle
Aux dentelles de catin poudrée pour le spectacle.
Je pardonne à mon cœur de n’être qu’un gamin
Têtu comme une vague qui ne sait son destin
Qu’aux abords de la plage qui la verra mourir,
Toujours le même chagrin dans sa ligne de mire.
Je me pardonne de tout ce que je ne sais plus
Et même de toutes ces choses que je n’ai jamais sues.
Je me pardonne de tout.
Mes rêves et mes secrets
Mes toujours, mes jamais
Mes défaites, mes victoires
Mes frissons dans le noir.
Je pardonne mes absences
Mes fautes et mes regrets
Je pardonne à ma chance
De se montrer frivole
Et à la circonstance
D’être ma seule boussole.
Je me pardonne.


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