Miraculeux matin

Le jour attendait son tour en vieil habitué
Laissant sortir la nuit sans bousculade pressée.
Patient comme le printemps aux premières heures d’avril
Dans l’air encore si frais qu’il nous impose des fils
De lainage ou de feutre que l’on rêve en exil.
N’était-ce que dans mes yeux qu’un débris de fatigue
Saupoudrait le jardin d’une si étrange lumière
Que paraissait flotter quelques vapeurs d’intrigue?
Les fleurs de cerisier d’un blanc imaginaire
Posait sur le matin un regard suspicieux
Tandis que les jacinthes redéployaient leur bleu.
Leur sourire d’ingénue ne semblait pas surpris
De l’incroyable instant qui dansait sur leur vie.
Le monde s’habillait, enfilant des dentelles
Ourlets tremblant sur l’aube de lueurs d’aquarelle
Chuchotant aux lève-tôt combien la vie est belle.
La nature alanguie se réveillait à peine
Des fourrures et des plumes prêtes à entrer en scène
S’ébrouaient en silence d’un soupçon de rosée
Qu’un rayon à venir devra évaporer.
Peut-être n’était-ce qu’un rêve qui s’attardait encore,
Des eaux de mon éveil ayant raté le port.
Peut-être ai-je conçu de petites miettes d’amour
Ce moment merveilleux du bruissement du jour.
Se peut-il vraiment qu’à chaque nouvelle aurore
Advienne le même miracle, se lève le même décor?
Je m’interroge encore aux heures du plein midi
Qu’ai-je vu ce matin qui me laisse éblouie?


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