J’ai lu ma vie sans faire d’histoires
Même quand le ciel virait au noir.
J’ai lu sagement sans m’arrêter
Je n’ai rien mis entre guillemets.
Mais aujourd’hui je sais c’est bête
Je voudrais poser une requête
Qu’on me laisse mettre un marque page,
Sur ce chapitre faire naufrage.
Je suis lassée de ces voyages
Je voudrais poser mes bagages.
J’ai pas sauté de paragraphes
J’ai pas supplié mon biographe
Même quand il me laissait pour morte
Au hasard d’une peine trop forte.
J’ai jamais lu en diagonale
Même pas mes lignes de cristal.
Mais aujourd’hui y’ a un rivage
Qu’on me laisse dormir sur cette plage
Je ne veux rien que de cette page
M’en faire une piste d’atterrissage.
J’ai jamais cherché à savoir
Combien de tomes à cette histoire,
La quatrième de couverture
Je n’en ai jamais fait lecture
J’ai cru à tout ce qui est écrit
Dans le grand livre de ma vie.
J’ai finalement été si sage
Que je mérite ce pâturage,
Une saison dans les herbages
Loin du chaos et des outrages.
Qu’on me laisse voler au temps
Quelques secondes de printemps,
Je l’écrirai à ma façon
De quelques mots sans ambition
D’une plume rose comme la tendresse
Encore fragile de détresse.
S’il le faut j’aurai le courage
Un jour de tourner cette page,
Je ne prendrai aucun otage
Ne piègerai de personnage,
Je ne poserai pas de question
À l’écrivain de mes passions.
Je ne demande qu’une virgule
Des rimes en lettres majuscules,
Écrites à l’encre indélébile
D’une calligraphie gracile.
Juste aujourd’hui sur un nuage
Qu’on laisse sourire mon visage.
Je ferai pas venir l’orage
Je veux juste voir du paysage.
Et quand arrivera l’épilogue
J’aurais aussi goûté la drogue
De la vie vraie, de ce poison
Dont parlent toutes les chansons.
J’aurais vécu jusqu’à la garde
Malgré les épines, les échardes.
J’ai lu longtemps avec courage
Malgré l’ennui de certaines pages.
Maintenant je voudrais une image
Pour m’arrêter sur ce passage,
Laissez moi croire à ce mirage
Je n’en demande pas davantage...
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